"J’aime bien comparer l’enseignant.e à un.e médecin. Le médecin s’appuie sur différents travaux scientifiques pour aboutir à la meilleure prise en charge possible de son ou sa patiente. Il n’ira pas trouver des recettes magiques dans les journaux scientifiques, mais il sera capable de comparer les pratiques entre elles, de choisir les plus efficaces et d’avoir des éléments pertinents pour comprendre la personne auquel il ou elle fait face.
Les sciences cognitives vont jouer le même rôle pour l’enseignant.e : lui recommander les pratiques les plus efficaces et lui donner une grille de lecture de son quotidien pour les adapter à ses élèves (« tiens, cette activité pourtant recommandée dépasse les ressources attentionnelles de mes élèves les plus faibles... je devrais l’adapter ! »).
Comme en médecine, ces recommandations proviennent d’études scientifiques : les pratiques recommandées ont été testées directement en classe et comparées les unes aux autres. Très concrètement, il a par exemple été montré que les pédagogies par pure découverte, où l’élève doit construire lui-même son savoir, sont moins efficaces, spécialement pour les élèves en difficulté, que les pédagogies plus guidées. L’enseignant peut ainsi savoir que toutes choses égales par ailleurs, mieux vaut donc privilégier ces dernières. Pour autant, cela ne veut pas dire qu’il faille jeter les pédagogies par découverte à la poubelle. Si l’enseignant pense qu’elles ont un avantage dans une situation donnée (élèves avec une très faible confiance en eux, envie de transmettre le processus de la découverte scientifique), les sciences cognitives lui donnent une compréhension fine du fonctionnement de l’attention, de la mémoire pour pouvoir adapter cette pratique et la rendre efficace.
En l’occurrence, le problème des pédagogies par découverte est qu’elles demandent à l’élève de faire trop de choses en même temps : se concentrer sur les notions à savoir, mais aussi s’organiser à court et long terme, se donner des objectifs, superviser l’efficacité d’un processus qu’il ou elle ne connaît pas, etc. Il suffit donc de renforcer le guidage apporté par l’enseignant.e, d’expliciter les objectifs sous-jacents au lieu de les faire deviner pour améliorer leur efficacité.
On parle de pratiques pédagogiques, mais cela concerne même l’organisation de l’école. Il a été montré que l’adolescence et ses bouleversements hormonaux décalent le cycle de sommeil : un.e adolescent.e a besoin de se lever plus tard et de se coucher plus tard. Des études montrent que, quand le collège ou le lycée décale les emplois du temps d’une heure ou d’une demi-heure, les élèves de cet âge dorment mieux et apprennent mieux. Enfin, d’autres études concernent des problématiques plus « sociales » : impact des environnements familiaux sur les ressources cognitives, renforcement des apprentissages chez les élèves les plus en difficulté..."